L’hémophilie touche aujourd’hui près de 7 000 français. Ce nombre n’est finalement pas si anodin. Pourtant, elle reste une pathologie encore méconnue, dont l’impact sur le quotidien est important.
Sa prise en charge invite à progresser d’un point de vue thérapeutique. D’ailleurs, les traitements ont connu de belles avancées, qui s’avèrent tout aussi encourageants à l’avenir, pour mieux prévenir les hémorragies et impacts sur le corps. Toutefois, d’autres moyens existent pour se protéger et se prémunir de l’apparition de complications.
Qu’est-ce que l’hémophilie ?
L’hémophilie est une maladie génétique qui affecte la coagulation du sang. Les personnes atteintes ne fabriquent pas suffisamment de facteurs de la coagulation. Concrètement, les facteurs de coagulation sont des protéines qui permettent la formation de caillot sanguin qui, lui, permet d’arrêter un saignement.
Par un manque de ces facteurs, la maladie entraîne alors des saignements plus importants et plus longs. Le caillot de sang se forme difficilement, il est aussi plus fragile. La pathologie est ainsi caractérisée par des hémorragies plus ou moins importantes, spontanées ou dues à un choc.
Par exemple, en cas de simple coupure, le saignement sera tout de même important et la cicatrisation plus lente. De plus, des bleus apparaissent souvent sur le corps. En cas de blessure plus importante, l’hémorragie doit être vite prise en charge à l’hôpital.
C’est une maladie héréditaire qui touche surtout les hommes. En effet, les gènes de l’hémophilie se transmettent sur le chromosome X. Or, chez les femmes, le 2ème chromosome peut compenser la mutation du 1er, contrairement aux hommes. Ceux-ci sont systématiquement malades lorsqu’ils héritent du gène muté.
Il existe 2 types d’hémophilie :
- L’hémophilie A, due à un déficit en facteur de coagulation VIII (80% des cas)
- L’hémophilie B, due à un déficit en facteur IX
La maladie peut être mineure (50% des cas), modérée ou sévère (35%) jusqu’à très grave (15%). La sévérité dépend du taux de facteur présent dans le sang.
Selon l’INSERM, 1 garçon sur 5 000 naissances est atteint d’hémophilie A. L’hémophilie B concerne quant à elle 1 garçon sur 20 000 naissances.
La pathologie touche près de 7 000 personnes, selon France Asso Santé.
On pose le diagnostic grâce à des tests de coagulation réalisés par une prise de sang. Celle-ci de détermine si la coagulation du sang est anormalement lente.
Aussi, en cas d’antécédents familiaux, un diagnostic prénatal peut être effectué à la naissance.
Les personnes atteintes souffrent alors :
- De saignements plus importants, de manière inattendue ou suite à un choc ou une blessure
- De saignements internes, notamment au niveau des muscles, des articulations, de l’appareil digestif, et parfois au cerveau
- D’une cicatrisation lente
- D’hématomes sur le corps
- D’hémarthroses : un épanchement du sang au niveau des articulations, entraînant des gonflements et potentiellement des problèmes articulaires
- D’une immobilisation et de douleurs importantes, notamment lorsque les saignements sont internes
À ces symptômes, s’ajoute en conséquence une grande fatigue.
L’enjeu pour mieux vivre avec l’hémophilie : la prévention
Aujourd’hui, une personne hémophile peut vivre presque normalement, selon la sévérité de la maladie, notamment grâce aux traitements. Ceux-ci se sont fortement améliorés et la recherche ne cesse d’innover pour mieux vivre avec la maladie.
Un hémophile peut pratiquer une activité sportive et avoir une vie professionnelle, dont le métier ne nécessite pas d’effort physique important. Encore une fois, tout dépend du degré de sévérité de la maladie. De plus, il est essentiel qu’un patient hémophile parle de sa maladie : aux professionnels de santé, sur son lieu de sport et de travail, pour informer, faire comprendre et adapter sa vie quotidienne.
L’enjeu réside dans la prévention des hémorragies et complications, la protection des articulations et l’atténuation des douleurs. Pour ainsi améliorer la qualité de vie de la personne atteinte d’hémophilie.
Prévenir les saignements
L’hémophilie ne guérit pas, mais les traitements permettent de la contrôler, même s’ils s’avèrent contraignants.
Ils reposent sur l’injection de facteurs de coagulation qui font défaut chez la personne atteinte. Ils sont de 2 ordres :
- Un traitement curatif : il est administré par perfusion en cas d’hémorragie. Il permet de la stopper. En cas de saignement dû à un choc ou une blessure, la prise en charge hospitalière est nécessaire. Le patient recevra alors des facteurs de coagulation via une perfusion.
- Un traitement préventif : le malade peut s’injecter des facteurs de coagulation, de manière préventive, à domicile. Il s’agit de traitements dits « prophylactiques » de longue durée, notamment en cas d’hémophilie modérée ou sévère (généralement 2 à 3 auto injections par semaine). Ils permettent une coagulation du sang quasi normale, en cas de saignement.
En l’absence d’un traitement prophylactique :
- en cas d’accident ou de blessure importante, un patient hémophile doit s’injecter le plus rapidement possible une dose de facteur de coagulation ;
- les hématomes et hémarthroses sont plus volumineux, douloureux et immobilisant ; ils compressent les vaisseaux et nerfs et sont également à l’origine d’une anémie sévère.
Un suivi médical régulier est nécessaire, coordonné par un centre de traitement de l’hémophilie.
Aussi, des médicaments tels que l’aspirine ou anti-inflammatoires non stéroïdiens sont à éviter, puisqu’ils fluidifient le sang et donc augmentent le risque d’hémorragie.
La recherche a fait d’importants progrès : un patient hémophile vit bien mieux qu’il y a 20 ans. Et elle ne s’arrête pas là : les innovations thérapeutiques améliorent sans cesse les traitements de substitution.
Protéger les articulations et muscles
Les saignements à répétition, notamment au niveau des articulations entraînent une dégradation du cartilage, une déformation articulaire et donc une perte de mobilité et de souplesse. Cela peut causer des problèmes arthrosiques, un handicap, et nécessiter une éventuelle pose de prothèse chirurgicale.
L’enjeu est donc de prévenir les saignements d’une part, au moyen de traitements, et de protéger les articulations et les muscles d’autre part.
L’activité physique, alliée à de la kinésithérapie, permet de préserver la mobilité des articulations et la tonicité musculaire.
D’une part, des séances régulières de kinésithérapie permettent de renforcer les articulations, d’entretenir la souplesse des muscles et de prévenir des séquelles articulaires éventuelles. D’autre part, la kiné permet de préparer la pratique sportive en minimisant les risques de blessures.
Alors qu’on pourrait penser le contraire, l’activité physique est en effet fortement conseillée. Elle renforce les muscles et articulations. Bien sûr, elle est adaptée, et les sports qui peuvent entraîner des chocs violents sont à éviter (tels que les sports de combat ou le rugby).
Néanmoins, des risques existent : des blessures telles que des fractures, ruptures de ligaments, entorses, tendinites, etc. peuvent provoquer des hémorragies. C’est pourquoi, lors d’une consultation, le patient hémophile définira avec son médecin référent le sport le plus adapté, en fonction de sa capacité physique, et de ses préférences bien sûr. Cette consultation permettra également de définir les mesures à prendre pour prévenir les risques.
De plus, il est important que l’activité soit collective et encadrée, avec des équipements de protection. Il est nécessaire d’informer le coach sportif, afin qu’il sache réagir en cas de problème.
Prévenir les comorbidités
L’hémophilie est à l’origine d’une sédentarité importante, qui peut notamment entraîner un surpoids, un diabète ou des problèmes cardio-vasculaires.
Une activité physique permettra de prévenir ces comorbidités.
De plus, un programme d’éducation thérapeutique aura un rôle important à jouer dans cette prévention. En effet, l’ETP vise à :
- Mieux connaître sa maladie, ses symptômes, les risques, son traitement
- Communiquer avec les professionnels de santé qui, parfois, ne connaissent que trop peu la maladie
- Devenir acteur de sa maladie, pour gérer au mieux les risques d’hémorragies et la douleur
- Et donc vivre au mieux avec elle
Les traitements médicamenteux ne cessent d’évoluer, permettant de mieux vivre avec l’hémophilie. À ceux-ci s’ajoutent l’éducation thérapeutique pour mieux la connaître, réagir face aux risques et symptômes, et communiquer vers les professionnels de santé qui ne maîtrisent pas forcément cette maladie rare.
L’important est donc de dialoguer, tant avec les soignants qu’avec son entourage. De plus, une activité physique adaptée, associée à de la kinésithérapie, permettront de protéger muscles et articulations, de prévenir les complications et de limiter les douleurs.
Pour aller plus loin :
- quelques témoignages de personnes hémophiles sur le site de France Assos Santé
- des informations complètes pour mieux comprendre vivre avec cette pathologie sur le site de l’Association française de l’hémophilie
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